Tour d’horizon des termes utilisant le mot valeur(s) en entreprise, avec à chaque fois une définition, une problématique, une piste de réflexion.
Temps de lecture : 7 minutes
Les termes ou expressions qui font appel au mot « valeur », au singulier ou au pluriel, ne manquent pas dans la sphère du travail, prenant une multitude de formes et embrassant des réalités bien différentes. Au risque d’en devenir un mot-valise derrière lequel il n’y a plus de réel sens partagé, faisant place à un implicite, source d’incompréhensions et d’attentes insatisfaites.
Mais commençons par les définitions de base du mot valeur seul :
Source : https://www.cnrtl.fr/lexicographie/valeur
La liste n’est pas exhaustive, mais permet de délimiter un champ d’interprétation applicable au contexte de l’entreprise et du travail.
Ce cadre étant posé, intéressons-nous à 8 utilisations du mot valeur.
1 – Valeur ajoutée
Définition
Différence entre la valeur finale d’un produit au prix du marché et la valeur initiale des matériaux et des services utilisés pour sa production.
Problématique et pistes de réflexion
La notion de valeur ajoutée est essentiellement économique et se veut donc mesurable, afin notamment d’évaluer la rentabilité d’un investissement. Par extension elle est implicitement au cœur des logiques de recherche de ROI, y compris dans les investissements en matière de gestion des ressources humaines.
Rendre tangible la valeur ajoutée de l’action RH est une des conditions pour modifier sa perception de coût en acceptation d’investissement. Plus facile à dire qu’à faire, l’exercice mérite d’être mené notamment dans les phases de construction budgétaire, qu’il s’agisse des effectifs RH, des outils (notamment SIRH) ou des achats de prestation (recrutement, formation, avocat, conseil, …).
Par défaut il est possible de raisonner a contrario c’est-à-dire d’évaluer le manque ou la perte de valeur ajoutée à ne pas faire. Par exemple l’impact de l’absence d’un processus d’onboarding sur le taux de turn-over pendant la période d’essai.
2 – Création de valeur
Définition
La création de valeur est la capacité de l’entreprise à générer de la richesse ou de l’utilité grâce à son activité. La création de valeur est l’ensemble des activités permettant à une entreprise de générer de la valeur ajoutée. Les principaux types de création de valeur sont le capital financier, le capital technologique le capital humain, le capital social et la marque.
Problématique et pistes de réflexion
La création de valeur RH dépasse largement la génération de valeur ajoutée. Si elle semble évidente au titre du capital humain, elle peut par extension avoir un impact sur le capital technologique et donc financier notamment au titre de l’innovation portée par le travail, mais également sur le capital social et par extension de la marque, au travers notamment l’action RSE de l’entreprise dans sa dimension sociale et sociétale.
L’explicitation de la création de valeur de la politique et de l’action RH peut ainsi constituer une puissante preuve de matérialité de la Marque Employeur et de l’Expérience Collaborateur.
3 – Chaîne de valeur
Définition
La chaîne de valeur est un concept développé par Mickael Porter en 1985 consistant à schématiser l’entreprise comme un enchaînement d’activités interconnectées qui développent chacune une valeur plus ou moins stratégique et importante pour l’entreprise. Elle permet d’identifier ses activités clés, à savoir celles qui, de par leur nature ou leur organisation, apportent un avantage concurrentiel permettant de se différentier sur son secteur d’activité.
Problématique et pistes de réflexion
On peut distinguer deux approches de la chaîne de valeur en matière de gestion des ressources humaines. D’une part l’impact des activités du travail (et donc de l’action des salariés) dans la création de valeur et d’avantage concurrentiel, occasion notamment de parler de savoir-faire et de compétences individuelles et collectives.
D’autre part la propre chaîne de valeur de l’action RH, de sa politique à ses processus, à la fois comme contribution à la chaîne de valeur globale de l’entreprise et comme création d’un avantage concurrentiel en tant qu’employeur sur le marché du travail.
4 – Partage de la valeur
Définition
« Répartition juste et optimale des richesses créées entre les différentes parties prenantes pour à la fois davantage d’efficacité économique – renforcer la compétitivité coût et hors coût des entreprises et dynamiser une croissance durable – et davantage de progrès social – créer des emplois de qualité et augmenter le pouvoir d’achat ». (Accord national interprofessionnel du 10 février 2023)
Problématique et pistes de réflexion
Le partage de la valeur est à la croisée de la performance économique et de l’attractivité de l’entreprise en tant qu’employeur. C’est aussi un levier de motivation et de fidélisation dans une logique de justice sociale et de perception de juste reconnaissance de la contribution du travail aux résultats de l’entreprise.
Si les entreprises de plus de cinquante salariés ont déjà, par nécessité, par opportunisme ou par conviction, mis en place des dispositifs de partage de la valeur, les récentes évolutions réglementaires concernent dorénavant les entreprises de 11 à 49 salariés. Reste à trouver le juste équilibre entre les dispositifs existants (participation, intéressement, prime, abondement au PEE) pour répondre aux exigences de sens et de pertinence, tant RH qu’économique.
5 – Valeur travail
Définition
Sur un plan économique et selon la définition d’Adam Smith, c’est le temps passé et donc la quantité de travail qu’il a fallu pour obtenir un bien, contrairement à une conception subjective de la valeur, où l’utilité en serait la source. Sur un plan philosophique et moral, c’est un élément-clé de notre interaction sociale, de notre contribution à la société et de notre réalisation personnelle.
Problématique et pistes de réflexion
La dimension philosophique et morale, pour ne pas dire idéologique, a largement pris le pas sur la dimension économique initiale. On pourrait même complexifier le sujet en cherchant à distinguer la valeur travail, la valeur du travail et la valeur au travail, mais l’exercice serait vain.
Reste que le sujet est matière à crispations et à incompréhensions, notamment entre travailleurs en emploi et hors emplois, entre générations, voire entre catégories socioprofessionnels et statuts, souvent fruit de stéréotypes de biais cognitifs et de jugements … de valeur !
C’est sans doute à travers l’explicitation de la valeur ajoutée et de la création de valeur et de leurs places dans la chaîne de valeur que peuvent être déconstruites les représentations de la valeur travail pour tendre vers un consensus voire un non-sujet.
6 – Valeur (de) marché
Définition
Montant (d’argent ou de biens ou de services) qui est considéré comme un équivalent équitable pour quelque chose d’autre ; caractère économique et mesurable d’un bien ou d’un service, compte tenu de son coût, de l’offre et de la demande. La valeur de marché correspond au prix auquel vous pouvez acheter ou vendre un actif sur le marché. C’est le résultat de la confrontation de l’offre de la demande. Si l’offre est supérieure à la demande, la valeur de marché diminue. A l’inverse, si la demande est plus forte que l’offre, la valeur de marché augmente.
Problématique et pistes de réflexion
La valeur marché appliquée à la ressource humaine pourrait tout aussi bien être abordée sous l’angle de l’employabilité. Qu’il s’agisse du candidat ou du salarié, c’est bien dans une logique de tension entre l’offre (de compétences) et la demande (d’emploi) que se joue la valeur marché, c’est-à-dire très schématiquement le niveau de rémunération.
Entre inadéquation des profils et faible attractivité des métiers, les facteurs impactant la valeur marché (du travail) des humains sont nombreux. Reste à les identifier individuellement pour en rechercher les causes racines et tendre à réduire les tensions entre offre et demande.
7 – Valeurs (d’entreprise)
Définition
Les valeurs d’entreprise sont l’ensemble des croyances et principes fondamentaux communs à l’entreprise et tous ses salariés, qui régissent le modèle et l’organisation de travail en matière de collaboration, de prises de responsabilité ou encore de management. Elles peuvent également définir la manière dont l’organisation interagit avec sa clientèle, ses partenaires et toute autre partie prenante. On peut distinguer plusieurs familles de valeurs, notamment : professionnelles, conquérantes, de conduite, sociétales, relationnelles, morales, d’épanouissement ou sociales.
Problématique et pistes de réflexion
Définir des valeurs d’entreprise est devenu un incontournable, que l’exercice soit mené par le top management ou dans une démarche collaborative avec l’ensemble des salariés. Le champ des possibles est vaste, même si statistiquement on retrouve régulièrement des notions d’innovation, d’engagement, de respect, de proximité, de responsabilité, d’exigence, de confiance, de bienveillance, d’excellence ou encore d’intégrité.
Et derrière chaque mot peut se trouver à la fois une définition, des compétences ou des comportements attendus.
Sans oublier que les valeurs réelles peuvent aussi être implicites et quelques fois bien différentes des valeurs explicitement affichées. Dans tous les cas se pose la question des décisions managériales à prendre en cas de manquement aux valeurs de l’entreprise. Une approche radicale consisterait à placer comme valeur socle l’intransigeance et à sanctionner tout manquement ou écart de conduite.
8 – Conflit de valeurs
Définition
Chaos intérieur, tant émotionnel que mental, qui impacte bien-être et interactions avec les autres, lorsque les injonctions du travail entrent en contradiction avec les convictions personnelles. Le conflit de valeurs survient lorsque les actions qui seraient menées afin de mettre en pratique une certaine valeur dans une situation donnée entrent en conflit avec les actions préconisées par une autre valeur qui semble également importante. On peut distinguer principalement les conflits éthiques, la qualité de travail empêchée et l’impression de faire un travail inutile.
Problématique et pistes de réflexion
Le conflit de valeurs peut à la fois avoir pour conséquences le désengagement, la dégradation de la santé ou encore la fuite du travail. Souvent larvé et à bas-bruit, le conflit de valeurs est complexe à identifier et à verbaliser, tant il met en opposition un cadre de référence personnel et un cadre de référence professionnel.
S’il est en partie possible d’évaluer l’alignement des valeurs des candidats à celles de l’entreprise dans le cadre du processus de recrutement, il est beaucoup plus complexe, voire impossible, d’assurer la mise en cohérence des valeurs des individus entre eux. Or les conflits de valeurs, s’ils peuvent être organisationnels, sont souvent interpersonnels, au cœur des relations qui maillent l’entreprise.
D’où la nécessité d’expliciter, d’incarner et de garantir les incontournables des valeurs d’entreprise, et de prévoir les modalités de régulation des conflits de valeurs interpersonnel.
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