Les compétences extra-RH des DRH

Dans un monde où la complexité et l’incertitude sont monnaie courante, les Directeurs/Directions des Ressources Humaines (DRH) doivent élargir leur éventail de compétences pour relever les défis de l’entreprise moderne.
Au-delà des compétences traditionnelles en gestion des ressources humaines, les compétences extra-RH sont indispensables à l’exercice du métier pour être à la fois crédible et impactant.
Dans cet article, nous explorerons les compétences non conventionnelles mais essentielles que les DRH doivent posséder en mettant en lumière leur impact sur le retour sur investissement (ROI) tangible ou organisationnel qu’elles apportent.

Temps de lecture : 10 minutes

Les compétences extra-RH des DRH

1 – Les compétences de gestion d’entreprise

Elles sont fondamentales pour un Directeur des Ressources Humaines (DRH), et elles complètent efficacement les compétences RH. De quoi parle-t-on ?

Comprendre le business : La compréhension approfondie des objectifs, de la stratégie et des opérations de l’entreprise nous permet de développer des politiques RH alignées sur les objectifs et de contribuer de manière proactive à la réussite globale de l’organisation.

Connaître les enjeux financiers : La capacité à comprendre les enjeux financiers de l’entreprise est cruciale pour prendre des décisions RH en pleine consciences de leurs impacts économiquesC’est ainsi que nous pouvons piloter justement la masse salariale, soutenir la consultation annuelle sur les résultats sans en faire un pur exercice juridique mais plutôt en binôme avec le DAF d’en faire un temps de pédagogie et d’éclairage sur les équilibres globaux. C’est aussi un indispensable pour la construction de dispositifs de partage de la valeur innovants ou les NAO.

Analyser les données : La fonction RH a toujours brassé une quantité significative de données, qu’elles soient administratives et statiques ou orientées vers le développement et dynamiques. L’évolution croissante des exigences de pilotage et de reporting couplée à la sophistication exponentielle des outils de consolidation, d’analyse (y compris prédictive) rendent indispensable la maîtrise du cycle de vie des données et des principales règles statistiques de leur exploitabilité permettant d’en tirer toute leur valeur.

2 – Les aptitudes en communication

Dans un environnement où l’attraction et la rétention des salariés sont cruciales, les DRH doivent maîtriser des compétences en marketing et communication pour promouvoir la marque employeur de l’entreprise, attirer les candidats les plus qualifiés et maintenir l’engagement des salariés actuels. Voici comment ces compétences s’intègrent dans notre rôle :

Développer des stratégies de marketing RH : nous devons être capable de concevoir et de mettre en œuvre des stratégies de marketing RH pour attirer les meilleurs du marché. Cela implique de comprendre les besoins et les motivations des candidats potentiels, de créer des messages convaincants et de choisir les canaux de communication les plus efficaces pour toucher le public cible.

Communiquer la marque employeur : nous jouons un rôle crucial dans la promotion de la marque employeur de l’entreprise en mettant en valeur sa culture, ses valeurs et ses avantages concurrentiels. Cela nécessite une communication claire et cohérente à travers différents canaux, tels que les réseaux sociaux, les événements de recrutement et les interactions directes avec les candidats mais aussi avec les salariés.

Faire passer les messages internes : En tant que chef d’orchestre de la communication interne, il nous appartient de diffuser efficacement les messages de l’entreprise à travers toute l’organisation. Cela implique de communiquer de manière transparente sur les changements organisationnels, les initiatives RH et les opportunités de développement professionnel pour garantir la motivation et l’engagement des salariés.

3 – Que ferait un DRH sans compétence Organisation et processus ?

Dans un environnement où la digitalisation et l’automatisation transforment les modes de travail, le DRH doit être capable de participer (voire d’animer) aux débats opérationnels sur l’organisation du travail pour mettre en perspective les enjeux humains articulés aux objectifs de productivité, de performance et de création de valeur. Et, le cas échéant, de collaborer étroitement avec les Directions des Systèmes d’Information (DSI), de la Qualité et de la Transformation pour garantir l’efficacité et l’efficience des processus RH. Concrètement de quoi s’agit-il ?

Se Coordonner avec la DSI pour l’optimisation des outils RH et de production : il est indispensable de travailler en étroite collaboration avec la DSI pour développer et mettre en œuvre des solutions technologiques innovantes pour la gestion des compétences, la paie, la formation et d’autres processus RH. Cela implique de comprendre les besoins des utilisateurs, d’évaluer les options disponibles sur le marché et de garantir l’intégration et la compatibilité avec les systèmes existants. Mais au-delà, une bonne culture SI permet aux DRH de prendre la mesure des impacts opérationnels des projets SI Métier, tant dans leur phase de développement que dans leur phase de déploiement.

Collaborer avec la direction qualité pour l’amélioration continue : quelque soit la taille de l’entreprise, notre métier doit également collaborer avec la direction qualité pour garantir que les processus RH sont conformes aux normes et aux réglementations en vigueur, tout en cherchant constamment des opportunités d’amélioration. Cela peut inclure la mise en œuvre de mesures de contrôle de la qualité, l’analyse des indicateurs de performance et la participation à des initiatives d’amélioration continue pour garantir l’excellence opérationnelle.

Travailler avec la direction de la transformation pour l’innovation RH : Enfin, nous sommes naturellement un des acteurs clés de la transformation organisationnelle en identifiant les besoins en matière de compétences, en promouvant une culture de l’innovation et en facilitant le changement à tous les niveaux de l’organisation. Cela nécessite une compréhension approfondie des tendances du marché du travail, des nouvelles technologies et des pratiques RH émergentes sans céder aux effets de mode, ainsi que des compétences en gestion du changement et en communication pour mobiliser et impliquer les parties prenantes.

4 – Extra-RH ou RH il faut choisir : savoir traiter les crises et maitriser les risques

La gestion de crise constitue une compétence cruciale pour les directeurs des ressources humaines. Face à des situations imprévues au-delà des pandémies, des crises économiques ou des conflits internes, les DRH doivent être en mesure de réagir rapidement et efficacement en toute circonstances. Cela implique de développer des plans de continuité des activités, de coordonner les communications internes et externes, et de fournir un soutien aux salariés affectés par un épisode imprévu. Nous contribuerons nécessairement à la résilience organisationnelle à un retour à la stabilité.

Parallèlement, la maîtrise des risques est une autre compétence clé. Avoir la capacité de scruter, d’analyser et de peser minutieusement les risques potentiels associés aux pratiques RH, à la conformité réglementaire, aux relations de travail et aux changements organisationnels, telle est cette compétence. Elle nous invite à une évaluation continue des risques inhérents à des décisions telles que les réductions d’effectifs, les fusions et acquisitions, ou les politiques de rémunération. Nous nous employons aussi à déployer les mesures préventives appropriées.

5 – Les DRH ne peuvent pas passer à côté des fondamentaux en utilisation de l’IA

La connaissance, la compréhension, puis l’utilisation au service de la transformation de l’intelligence artificielle dans les processus RH est déjà une compétence indispensable à intégrer dans notre quotidien.

Pour deux raisons majeures :

1) avoir conscience du temps libéré, facilité par l’IA dans un certain nombre de tâches d’exécution transactionnelles ;

2) assumer et anticiper notre responsabilité sur la transformation des métiers de notre filière et de toute l’entreprise. Nous devons donc à la fois saisir les gains de productivité apportés par ces outils y compris les outils génératifs et en même temps être les garants de leur utilisation progressive et intégrée à une GEPP responsable. Car l’arrivée de l’IA génère un stress psychologique pour les plus juniors ou les salariés clairvoyants sur la puissance apportée qu’il nous appartient d’accompagner.

6 – Le DRH n’a pas de pouvoir il’ n’a que de l’influence

A ceux qui s’imaginent encore que notre métier est un métier de pouvoir, qu’ils se rassurent il est bien plus complexe. C’est un métier d’influence dans lequel s’invitent volontiers le doute et l’humilité. Comment s’en débrouiller ?

Développer des relations interpersonnelles solides : il n’y a pas d’option, il faut développer des relations de confiance et de collaboration avec les cadres dirigeants, les managers, les salariés et les partenaires externes pour influencer positivement les décisions et les comportements.

Communiquer de manière persuasive : nous devons être des communicants efficaces et persuasifs, capable d’articuler clairement notre vision, nos objectifs et nos recommandations pour susciter l’adhésion. Il nous faut donc savoir persuader, négocier, être diplomates et savoir surmonter les obstacles et résoudre les problèmes de manière collaborative.

Naturellement s’invite alors les compétences d’humilité et de doute :

Mais nous devons aussi reconnaitre nos propres limites ainsi que celles de nos équipes et de l’organisation dans son ensemble. Cette reconnaissance permet d’être conscient des domaines dans lesquels des améliorations sont nécessaires et de chercher activement des moyens de les aborder tout en mettant en perspective : les moyens nécessaires à leur amélioration ou les renoncements momentanés à engager. Dans une posture humble, le DRH est un régulateur du tout « tout de suite » ou du « y a qu’à faut qu’on ». C’est une posture délicate, qui peut laisser esseulé et qui pourtant est un vecteur de QVCT pour tous. Car on attend souvent de cette fonction « improductive, centre de coût » qu’elle démontre un ROI. En étant à la fois humble et posé dans les étapes à franchir pour avancer progressivement, le DRH apporte un ROI indirect à l’organisation à laquelle il appartient.

Le doute qui fait équipe avec l’humilité nous pousse remettre en question les pratiques et les processus existants, même s’ils semblent être efficaces. Cela peut conduire à une réflexion critique sur les façons de faire actuelles et à l’exploration de nouvelles approches qui pourraient être plus adaptées aux besoins changeants de l’organisation et donc facteur de ROI.

7 – L’Intuition est-elle une compétence ?

L’intuition est une compétence souvent sous-estimée mais cruciale pour notre métier, car elle nous permet de prendre des décisions rapides et efficaces dans des situations complexes et incertaines. Voici quelques aspects clés de cette compétence très délicate à rendre utile et crédible dans les environnements hyper rationnels où toutes les décisions doivent être justifiées et documentées.

Lire les dynamiques humaines : Un DRH doté d’une forte intuition est capable de lire entre les lignes et de comprendre les dynamiques humaines au sein de l’organisation. Cela lui permet de détecter les tensions, les préoccupations et les besoins non exprimés des salariés, ce qui lui donne un avantage pour anticiper les problèmes et prendre des mesures préventives.

Prendre des décisions rapides et adaptatives : Dans un environnement en constante évolution, un DRH doté d’une forte intuition est capable de prendre des décisions rapidement et de s’adapter aux changements de manière agile. Il se fie à son instinct pour évaluer les différentes options et choisir la meilleure voie à suivre, même en l’absence de données complètes ou de certitudes absolues. Bien qu’elle puisse être difficile à expliquer ou à justifier de manière objective, l’intuition peut jouer un rôle important dans la prise de décisions stratégiques et la navigation dans des situations complexes et dynamiques.

8 – Un DRH Imaginatif et authentique au service des organisations et des salariés

L’imagination et l’authenticité sont des compétences importantes, car elles permettent de favoriser l’innovation, l’engagement et la confiance au sein de l’organisation.

Stimuler la créativité : Avec l’équipe de direction nous nous devons d’encourager l’imagination, de créer un espace où il est encouragé de penser de manière créative et d’explorer de nouvelles idées.

Favoriser l’authenticité : En étant authentique dans nos interactions avec les salariés, nous créons un climat de confiance et de respect mutuel nous aidera à être en amont des situations critiques.

Encourager la prise de risque : A nous de soutenir les initiatives audacieuses et d’offrir un environnement où les salariés et les dirigeants se sentent en sécurité pour exprimer leurs idées et prendre des risques dans leur carrière.Adopter une posture apprenante et d’explorateur : en adoptant une posture apprenante et être constamment à l’affût des nouvelles tendances et des meilleures pratiques en matière de gestion des ressources humaines. Cela nécessite d’être ouvert à l’exploration de nouvelles idées et de nouvelles technologies, ainsi qu’à la collaboration avec d’autres professionnels de l’entreprise.

9 – Pas de DRH sans Anticonformisme et défense des convictions

L’anticonformisme et la défense des convictions sont des compétences essentielles pour un DRH, car elles permettent de remettre en question le statu quo et d’adopter des approches novatrices. Encore faut-il avoir le cran de l’affirmer.

Remettre en question les normes établies : Un DRH anticonformiste ne se contente pas de suivre les pratiques traditionnelles, mais cherche activement à explorer de nouvelles idées et méthodes. Cela peut inclure la remise en question des politiques et des procédures existantes pour les adapter aux évolutions de la société ou du marché de son entreprise.Défendre les convictions et les valeurs : il faut être doté d’une force de conviction et être prêt à les défendre, même si cela signifie prendre des positions impopulaires ou faire face à l’opposition. Cela peut inclure la défense de l’équité, la transparence des politiques de rémunération et d’évaluation, la défense de la diversité et de l’inclusion au sein de l’organisation, ou la lutte pour des politiques RH qui soutiennent le bien-être des salariés et leur développement professionnel.

En conclusion

Le rôle du Directeur des Ressources Humaines (DRH) est bien plus complexe et nuancé que ne le laissent souvent penser les descriptions de poste standard. Au-delà des compétences traditionnelles en gestion des ressources humaines, le DRH moderne doit jongler avec une multitude de compétences extra-RH, allant de l’intuition à l’authenticité, en passant par l’utilisation de l’IA, le marketing-communication, l’organisation et les processus, et l’influence. Ce sont ces compétences, combinées avec une réelle passion et un engagement envers le bien-être des salariés, qui font de ce métier une véritable vocation.

Pour ceux et celles qui aspirent à une carrière dans les ressources humaines, il est essentiel de reconnaître l’étendue et la diversité des compétences requises. Les programmes de formation et les cursus universitaires doivent être conçus de manière à intégrer non seulement les aspects techniques de la gestion des ressources humaines, mais aussi les compétences interpersonnelles, créatives et stratégiques nécessaires pour exceller dans ce domaine.

Les DRH ne sont pas simplement des gestionnaires, mais des leaders imaginatifs qui façonnent l’avenir du travail avec attention, innovation et un profond sens de l’humanité.

En embrassant cette dimension holistique du rôle du DRH et en investissant dans le développement de ces compétences diverses et complémentaires, nous pouvons créer des environnements de travail plus dynamiques, inclusifs et épanouissants pour tous. Car après tout, c’est avec le cœur que les meilleurs DRH mènent leur mission de compréhension de la réalité du travail au service de la réussite des individus elle-même au service de la réussite des organisations. Et parce que l’auteur de ses lignes est authentique et lucide, elle vous dira qu’elle est humble face à l’ensemble des ces compétences multi-facettes auxquelles elle doit travailler encore et encore pour ne pas perdre en clairvoyance, humilité et employabilité.