Vous manquez de candidats répondant à vos besoins de recrutement ? Comment agir sur votre offre pour changer de modèle plutôt qu’attendre que le marché de l’emploi change ? Les pistes d’action pour faire face aux 6 principales difficultés.
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Difficultés de recrutement, de quoi parle-t-on ?
On pourrait résumer le terme de difficulté de recrutement à la seule finalité du recrutement c’est-à-dire l’acquisition de nouveaux collaborateurs. La difficulté à recruter revient donc à ne pas trouver les candidats correspondant aux profils et compétences requises pour tenir un poste donné, et de surcroit à voir ces candidats accepter l’offre d’emploi qui leur ait faite.
Dit autrement, la question tourne autour d’un déséquilibre entre l’offre et la demande, en considérant ici que la demande vient des entreprises (en demande de ressources humaines) et que l’offre est constituée des actifs en demande d’emploi (qu’ils soient en poste ou non). Ce passage par le mécanisme de libre-échange de l’offre et de la demande met en exergue que lorsque l’offre est insuffisante au regard de la demande (c’est-à-dire ici les difficultés de recrutement), alors se produit une augmentation des prix, dit autrement une augmentation des exigences des candidats susceptibles d’être considérés comme pertinents par les recruteurs.
Le paradoxe vient alors du niveau d’exigences et d’attentes des entreprises qui recrutent. Plus la demande est spécifique et restrictive (en termes de diplôme, d’expérience, de compétences, de niveau de rémunération, …), plus le potentiel d’offre (c’est-à-dire le nombre de candidats conformes) se restreint, et plus le coût d’acquisition augmente (effort de sourcing, qualité de l’expérience candidat, contenu du poste, rémunération, conditions d’emplois et avantages, …) dans un marché concurrentiel.
Un constat simple et basique qui ne doit pas pour autant amener à la conclusion de devoir se satisfaire de profils par défaut, mais qui vient plutôt questionner le juste dimensionnement de la demande. Car combien de temps peut-on raisonnablement accepter qu’un poste ne soit pas pourvu ?
Cette question en appelle une autre, pourquoi recrute-t-on ? Il y a en fait deux réponses à cette question : pour répondre à quel besoin de l’entreprise est-on amené à recruter ? pourquoi choisir le recrutement pour répondre à ce besoin ?
A la première question la réponse est schématiquement simple : on recrute soit pour remplacer quelqu’un soit pour créer un nouveau poste, c’est-à-dire dans tous les cas pour réaliser des activités qui ne peuvent (plus) l’être par les seules ressources présentes. C’est ici que la durée raisonnable de vacance du poste est à mettre en perspective du coût pour l’entreprise à voir le travail ne pas se réaliser. Ce coût peut recouvrir des natures bien différentes : perte de client ou de marché (et donc de chiffre d’affaires), dégradation de la qualité, augmentation des délais de traitement, retard de développement ou d’innovation, risque de défaillance de gestion, dégradation de la santé au travail par déport de charge, … autant de natures de coûts qui n’ont pas les mêmes conséquences pour la pérennité de l’entreprise et qui ne présentent pas les mêmes durées de soutenabilité. Mais il y a bien toujours un moment où la vacance du poste n’est plus tenable et, faute de candidat, conduit soit à des renoncements soit à la recherche de solution alternative de type sous-traitance (fournisseur, partenaire, concurrent, freelance, …).
Vient alors la deuxième question, pourquoi recruter ? Qu’il s’agisse de CDI, de CDD, d’intérim, d’alternance, ou même de stage, le choix du recrutement répond à une double caractéristique : le coût d’acquisition de la compétence au regard des perspectives de valeur ajoutée, l’enjeu d’acculturation à l’entreprise et d’appartenance à un collectif de travail dans la durée. Car quelles que soient les considérations que l’on peut avoir sur le coût du travail (entendez ici la part de cotisations sociales), l’emploi salarié du secteur privé représente en France 70% de la population active. Il semble donc qu’il y a ait un intérêt (voire un bénéfice) réel pour l’entreprise à choisir le salariat comme modèle dominant d’acquisition et de recours à la main d’œuvre. Ces deux questions (pour quoi recruter et pourquoi recruter) étant posées, il apparaît comme une évidence qu’on ne peut pas se satisfaire de difficultés de recrutement ayant pour conséquence la vacance d’un poste et donc la non réalisation d’activités nécessaires à la bonne marche, au développement et à la pérennité de l’entreprise.
6 types de difficultés de recrutement et les pistes pour les surmonter
1 – Pénurie de compétences hard
Par opposition aux compétences soft, et autrement appelées compétences techniques, elles sont souvent au cœur des activités principales du poste à pourvoir. Elles relèvent du champ de la maîtrise d’un savoir-faire ou d’un geste professionnel, s’appuyant pour partie sur des savoirs académiques (diplôme, qualification, certification) et pour partie sur l’expérience. Leur coût d’acquisition pour celui qui les maîtrise est donc variable et se mesure principalement en temps (années d’études et/ou d’activité). Leur valeur de marché se compose naturellement de ce temps d’acquisition mais couplé d’une part au niveau de complexité (au sens cognitif de la mise en œuvre), d’autre part de la rareté, mesurée en nombre de personnes maîtrisant ces compétences.
Face à ce facteur de rareté il n’y a en théorie qu’une réponse possible pour être le recruteur à qui le candidat dira oui : être mieux disant que tous les autres ! Encore faut-il savoir sur quoi l’être : la rémunération globale, le contenu du poste, le statut, les conditions de travail, les avantages divers, … Une approche qui pose un double problème : la surenchère du coût complet d’un poste au seul motif du caractère pénurique de ses compétences techniques indépendamment de sa réelle valeur ajoutée, et le risque de distorsion d’équité interne (principalement de rémunération et de classification) au regard de postes de technicité équivalente.
L’exigence de recrutement de profils pénuriques vient en fait d’un seul constat : le développement en interne des compétences techniques associées est plus long et/ou plus cher que l’acquisition externe. Mais alors quelles alternatives ? La première consiste à court terme à recourir à l’externalisation de main d’œuvre plutôt qu’au recrutement, couplé à moyen – long terme avec le développement de ces compétences pour des salariés déjà là, ce qui peut par ailleurs servir des objectifs d’employabilité et de fidélisation. La deuxième consiste à redéfinir l’organisation du travail pour réduire le niveau de dépendance à un seul et même poste en distribuant différemment les activités à compétences techniques rares entre plusieurs salariés. Des pistes qui évidemment se heurtent aux réalités de la taille de l’entreprise, de son système de production et de son modèle économique.
2 – Inadéquation des compétences soft
Autrement appelées soft skills, les compétences soft sont un continent à part entière, avec pour particularité d’être mal défini, non circonscrit et peu objectivé. Et pourtant, elles sont régulièrement considérées (à tort ou à raison) comme plus importantes que les compétences techniques au point d’écarter des candidats du processus de recrutement au seul motif de cette inadéquation.
Alors de quoi parle-t-on ? La liste est longue, ouverte et évolutive : adaptabilité, confiance en soi, esprit d’équipe, intelligence émotionnelle, sens de l’organisation, gestion du stress, capacité à apprendre, sens de l’écoute, gestion de l’incertitude, sens des responsabilités, initiative, travail à distance, curiosité, autonomie, résolution de problème, appréhension de la complexité, innovation, assertivité, pensée critique, créativité, … avec pour chacune de ces compétences des définitions pas toujours explicitées, rarement traduites en situations de travail observables ou modélisées en mises en situations pour l’évaluation des candidats. En résulte des jugements relativement subjectifs voire définitifs quand ils s’appuient sur des tests psychométrique qui enferment le candidat dans un déterminisme comportemental dont il ne pourrait s’extraire.
Alors que faire ? Dépasser l’appréhension de recruter quelqu’un avec qui, au bout de quelques mois, on se dira « ça va pas le faire » est un des principaux freins au choix du candidat final. Cette aversion au risque est naturelle et humaine, surtout quand il s’agit … d’humain ! L’enjeu est donc :
- d’objectivé d’abord les réelles compétences soft incontournables et déterminantes pour la réussite dans le poste
- de leur donner une définition précise (idéalement formulée avec un verbe d’action)
- de la traduire en quelques situations de travail emblématiques
- sur lesquelles il sera possible de déterminer les comportements acceptables (parce que plusieurs sont possibles, c’est le principe de la diversité)
- d’évaluer les modalités, le temps et le coût de développement de ces compétences lorsqu’elles ne sont pas maîtrisées
- d’intégrer ces éléments au processus d’évaluation (et idéalement de feed-back) des candidats
Évidemment ce n’est pas une recette miracle, mais cette approche s’inscrit à la fois dans une logique de maîtrise des risques et d’amélioration continue.
3 – Déficit d’attractivité des conditions d’emploi
A distinguer des conditions de travail, les conditions d’emploi recouvrent l’ensemble des éléments de la relation de salariat : outre la rémunération (dans toutes ses composantes), il s’agit de la classification, de la fonction ou de l’intitulé de poste, des clauses du contrat de travail (comme par exemple la période d’essai ou l’exclusivité), des horaires et de la durée du travail, des différents avantages sociaux, des congés, des modalités de télétravail, … le spectre est large et relève pleinement de la stratégie RH et du modèle économique de l’entreprise. On trouvera plus facilement un package avec une bonne protection sociale complémentaire, de l’épargne salariale, un volant significatif de jours de télétravail, … dans une banque que dans un centre d’appels. Il y a donc de fait une iniquité d’attractivité entre secteurs d’activité et tailles d’entreprises, dont les surfaces financières et les modèles de partage de la valeur peuvent être radicalement différents.
Il n’y a donc pas de miracles possibles sur le terrain des conditions d’emploi, mais 2 axes de réflexion à conduire :
- à coût constant, le mix de conditions d’emploi correspond-il réellement aux attentes des salariés, et donc des candidats ?
- ce déficit d’attractivité des conditions d’emploi est-il suffisamment compensé par l’attractivité du contenu et des conditions de travail ?
4 – Déficit d’attractivité du contenu et des conditions de travail
Contenu et conditions de travail, deux dimensions qui auraient presque pu être dissociées, parce qu’elles recouvrent des aspects différents. D’un côté le contenu du travail, c’est-à-dire la nature même des tâches et des activités du poste, auxquelles on pourra associer des dimensions de variété, de complexité, de niveau d’autonomie et de latitude décisionnelle dans leur réalisation, leur dimension auto-apprenante, ou encore leur sens et leur utilité. De l’autre les conditions de travail qui recouvrent des aspects matériels (locaux, outils, équipements, moyens), des aspects organisationnels (répétition, intensité, cadence, saisonnalité, flexibilité, juste à temps, ….) et des aspects psychosociaux (culture d’entreprise en termes de coopération, de management et de pilotage de la performance, climat social, relations avec les clients, …).
Dans les faits, le contenu et les conditions de travail sont intimement liés et pratiquement indissociables dans ce qui constitue in fine le vécu du travail. Le déficit d’attractivité de ce duo relève pour partie de représentations, de constructions sociales, de réputations, … et pour partie d’une réalité vécue des candidats ayant déjà exercé leur activité dans un contexte comparable à celui de l’entreprise. Il est donc difficile de séparer les représentations (qui peuvent être en partie déconstruites) du ressenti (qui n’est pas contestable quand il se nourrit du vécu).
Alors que faire ? A court terme assumer et rendre explicite l’implicite, plutôt que laisser croire le candidat à une réalité qui n’existe pas, promesse qui se paiera lors de la période d’essai ou dans un faible de taux de rétention, conséquence de l’écart classique entre travail prescrit et travail réel. A moyen terme, venir questionner chacune des dimensions du contenu et des conditions de travail dans une approche collective pour tendre vers une réduction des facteurs limitant d’attractivité. Un processus qui peut être long et, là encore, se heurter à une réalité économique qui offre de faibles marges de manœuvre.
5 – Déficit d’attractivité du secteur d’activité
C’est une dure réalité, mais quand bien même les conditions d’emploi, le contenu et les conditions de travail peuvent paraître attractives (et compétitives), certaines entreprises rencontrent des difficultés de recrutement simplement du fait de leur activité. Entre respectabilité, réputation, externalité négative (sociale, sociétale ou environnementale), perception d’utilité des biens et services proposés, ou encore reconnaissance et valorisation sociale du travail associé, les jugements moraux se sont invités dans les critères de choix des candidats qui ont les moyens de choisir. Les entreprises confrontées à ce type de déficits d’image semblent donc condamnées à ne pouvoir recruter que des candidats qui soit n’ont pas le choix d’être exigeants sur ces questions, soit n’en font des éléments rédhibitoires d’acceptation d’une offre d’emploi.
Pour tous les autres, l’exercice est périlleux. Si la tentation existe d’investir les approches de raison d’être, d’entreprise à mission ou à impact, de RSE, pour construire un nouveau récit d’utilité économique, l’exercice atteint ses limites quand le storytelling s’éloigne de la réalité observable. Le principal risque étant celui de la dissonance cognitive et du conflit de valeurs qui, dans la durée, conduira vraisemblablement au mieux à un désengagement au pire à un départ. Peu d’alternative donc à assumer la réalité de l’activité de l’entreprise, avec comme ouverture, si tant est que ce soit réel, la valorisation d’une réflexion ou d’un plan d’action engagés vers une redéfinition du modèle économique et de la mission de l’entreprise.
6 – Process de recrutement défaillant
Aux cinq principales difficultés de recrutement qui relèvent avant tout de la politique globale d’entreprise, vient s’ajouter une difficulté de méthode : celle des défaillances du processus de recrutement qui viennent décourager le candidat à poursuivre sa candidature. Sans surprise, elles peuvent survenir à toutes les étapes :
- sourcing : qualité de l’annonce, pertinence du canal, technique d’approche
- préqualification : lisibilité de la démarche, pertinence des questions, qualité de l’échange, clarté de la prochaine étape
- évaluation : cohérence des étapes et outils (entretiens, tests, mises en situations, …), posture des interlocuteurs
- relation candidat-recruteur : rythme et qualité des interactions, écoute des attentes, transparence sur le processus, gestion globale de l’expérience candidat
- offre : explicitation du niveau d’alignement aux attentes du candidats, présentation des conditions d’emploi, gestion de l’éventuelle négociation
- pré-onboarding : facilitation de la gestion administrative, pertinence et exhaustivité des informations transmises, disponibilité et réactivité aux questions du candidat, animation de la relation jusqu’au jour d’arrivée
- onboarding : qualité de l’accueil « humain », préparation matérielle et logistique, organisation des premiers jours, accompagnement à l’acculturation et à la montée en compétences, suivi et pilotage de la période d’essai
La liste n’est pas exhaustive, on peut facilement identifier une trentaine de points sur lesquels l’expérience candidat peut s’avérer insatisfaisante, jusqu’à décourager le candidat qui y verra les signaux faibles d’une future expérience collaborateur décevante.
Si le sujet peut paraître secondaire au regard des 5 premières difficultés de recrutement, la principale erreur serait de considérer que ce n’est que le problème du recruteur ou de la fonction RH. La qualité d’un processus de recrutement de bout en bout est l’affaire de toutes les parties prenantes, à commencer par le commanditaire, c’est-à-dire l’opérationnel pour qui on recrute.
Plus largement, dépasser ses difficultés de recrutement n’est pas qu’un problème de recrutement mais relève bien d’une démarche systémique de transformation de sa politique et de ses pratiques de management des ressources humaines.
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